Voilà un truc incroyablement mené avec une rythmique bien lourde et bien entraînante «I want a break thru'» par The Hykkers. Une perle Nigérianne et qui pointe son nez directement des années 70. De l'afrobeat brut... Une wah-wah bien (mal)menée...
À l'écoute du «African Reggae» de Nina Hagen, j'aime l'idée de la collusion entre punks et rastas; ou punk et reggae si l'on parle musique. Une utopie (?!) bizarrement réalisée dans le Brixton de Londres sous les terribles années Tatcher. Même Bob Marley avec «Punky Reggae Party» s'y était mis et l'enregistrement sur «Babylon By Bus» particulièrement réussi en témoigne. On connaît la reprise de «Police and Thieves» par The Clash tout aussi merveilleuse, mais elle, pleine de colère sublimée; et l'on écoutera au passage le fameux «Guns of Brixton»... Bien entendu, pour Nina c'est plus jubilatoire que revendicatif. L'alchimie est parfaite entre la rythmique reggae et sa voix légèrement cassée et railleuse mais d'une puissance extraordinaire.
Ray Barretto est un vrai magicien, bien entendu tout le monde connaît ses arrangements salsa depuis bien longtemps et ses talents de percussionniste. Pour l'avoir vu sur scène il y a bien longtemps, j'affirme que le souvenir de sa prestation me hante encore. Mais voilà que je découvre il y a peu son incroyable version du «Pastime Paradise» du grand Stevie Wonder; et pourtant le morceau Salsa-ifié date de 1980 (l'original remonte à 1976). Évidemment la version de Stevie reste une de ses grandes créations mais pour une fois un arrangement dépasse un merveilleux original... Le rythme très enlevé est particulièrement entraînant et joyeux, bien loin du sentiment de l'ennui sous-jacent à celle de Wonder. Un indépassable ?
Les poètes méconnus forment une cohorte aussi nombreuse que fumeuse, chacun y place le soldat de son choix. Pour ma part, j'aimerais que l'on réserve une place de choix à Sixto Rodriguez. Si l'on apprécie facilement l'intégralité de son album «Cold Fact», on peut admirer la beauté de son «Rich Hoax Folks». Sixto a chanté l'amour de la came, est-ce ce qui l'a placé hors du ban ? Un hippie méconnu mais que l'on peut apprécier sans faim et sans soif (la came coupe les appétits).
Certains doutent-ils encore de l'existence du sentiment profond et du caractère pathologique de la mélancolie ? Il y a bien des auteurs reconnus sur la question (allez! Søren Kierkegaard au hasard) mais des musiciens ? Baden Powell (le bon, pas l'amoureux des louveteaux, même si pour le bon le prénom est inspiré de l'amateur de routiers)... Si ses interprétations sont des merveilles de technique, l'inspiration est extraordinaire. Peut-être que les dissonances de la bossa facilitent la transmission du sentiment ? Il y doit y avoir de cela, car la bossa n'est que rarement joyeuse autrement que dans la forme. Chez lui l'abscence chronique de chant n'est qu'invisible, la musique chante par elle-même comme par enchantement. Tristeza mais quelle beauté! On conviendra que l'admiration que lui vouaient Carlos Jobim et Vinicius de Moares (ah! la jolie recette de femme) parle d'elle-même.